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Les jeux sont faits

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Signifier le caractère irréversible de la funeste trajectoire qui est la nôtre n’est évidemment pas de nature à rassembler. Cela porte atteinte à l’optimisme, celui, constructif, d’une petite partie de la population, ainsi qu’à l’autre plus béat de la majorité d’entre nous qui s’accroche, consciemment ou pas, à l’idée que les choses finiront bien par s’arranger, tôt ou tard, ou trop tard…
Il n’est pas très populaire donc, de faire part de l’inavouable conviction que le destin du monde est tracé de la pire des manières.
D’expliquer que sa complexité est telle aujourd’hui que l’indispensable concorde entre les principaux dirigeants de la planète pour infléchir de manière significative le cours des choses est un vœux pieux.
Qu’en dépit de réels progrès humains ici ou là, l’espoir d’un avenir meilleur s’éteint, tous les jours un peu plus.

Trois grands sujets offrent des perspectives très franchement effrayantes : l’évolution du climat, le déclin des démocraties et bien sûr, les différents risques de guerre.

La jeunesse des pays dits riches est très sensibilisée aux problèmes liés au réchauffement climatique et son engagement est une des rares sources d’espoir. Il ne s’agit pas ici de décourager les précieuses bonnes volontés ou d’inviter à relâcher les efforts qui malgré tout progressent sensiblement. Au contraire, le tri des déchets, les économies de consommation énergétique, encouragées par l’Etat ou individuelles et citoyennes, les économies d’eau, l’adaptation de nos modes de vie… tout cela doit bien sûr être poursuivi et amplifié.
Mais tout de même, la France rejette 0,9% des émissions mondiales de CO2 pendant que l’Allemagne qui a stoppé le nucléaire est à 2,2%, l’Inde à 6,6%, les Etats-Unis à 14,5% et la Chine représente à elle seule près de 30%.
Comment croire qu’il est possible d’enrayer le réchauffement climatique si les principaux pays pollueurs ne prennent pas des mesures radicales pour y parvenir ?
Comment espérer une planète plus vivable dans 10 ans quand la Chine ouvre une centrale à charbon par semaine ?
Qui pour convaincre Xi Jinping de cesser son carnage criminel alors qu’il considère que ce moyen de production d’électricité est indispensable au développement économique de la Chine, à sa conquête effrénée des marchés mondiaux ?
Ne cessons surtout pas de prendre des douches toujours plus rapides et d’éteindre les appareils qu’il y a peu nous laissions en veille, même si cela semble dérisoire compte tenu des enjeux planétaires.
Mais dans les années à venir, les étés seront toujours plus chauds, les incendies plus violents ici, les inondations plus meurtrières là, l’agriculture toujours plus en souffrance, la famine gagnera du terrain dans certaines régions du globe, et les flux migratoires augmenteront mécaniquement, créant d’autres types de difficultés.

Encore un mot sur Xi Jinping dont les observateurs craignent qu’il n’agresse Taiwan, à la manière de Poutine en Ukraine, alors que dans cette hypothèse, les Etats-Unis seraient contraints d’intervenir. La folie de ces hommes peut conduire à un conflit mondial dont les conséquences sont imprévisibles.

Enfin, nul besoin d’être un observateur avisé de la situation politique pour constater à quel point les démocraties vacillent partout dans le monde, y compris en France. Le populisme gagne du terrain sur tous les continents, les renoncements à la liberté se multiplient au profit d’une sécurité imaginaire, les thèses nationalistes, le sectarisme et la radicalité prospèrent au détriment de l’humanisme, la laïcité et l’universalisme. Les annonces de programmes économiques délirants, les simplismes les plus affligeants séduisent et les extrêmes progressent.

Nous sommes chaque jour un peu plus désorientés face aux multiples dangers croissants, à l’impossible concorde des nations qui permettrait seule d’envisager un avenir acceptable pour les générations futures.

Pour autant, continuons à couper l’eau en nous brossant les dents, à distinguer les illusionnistes des courageux qui affrontent les difficultés en démocrates soucieux des libertés, conscients de la complexité du monde et de l’urgence à créer des consensus entre les principaux responsables.
Même si c’est probablement trop tard, céder aujourd’hui au fatalisme et au renoncement serait à coup sûr suicidaire.
Il est possible (souhaitable) que cette vision soit excessivement pessimiste, mais même si elle ne l’est pas, adopter quoi qu’il arrive des attitudes constructives est la seule manière d’espérer que ce siècle se poursuive mieux qu’il n’a commencé.

MT