J’aime le sport, ou plus exactement le spectacle offert par les sportifs de haut niveau.
Pour en avoir pratiqué quelques-uns au siècle dernier, je crois avoir non pas conscience, mais une vague idée des qualités et des efforts requis pour atteindre l’excellence. Et en sport comme dans les disciplines artistiques ou en gastronomie, le spectacle de l’excellence m’impressionne toujours, m’émeut parfois.
Je peux tout regarder avec plaisir ou passion. J’évite seulement les disciplines dont j’estime que le comportement d’un nombre non négligeable de leurs spectateurs n’est pas respectable. Je me prive donc, et c’est sûrement dommage, des gestes techniques des Neymar et consorts, mais le sport le plus populaire de la planète m’est devenu insupportable en raison, notamment, de son environnement.
Donc le rugby !
Un mot pour commencer à propos de son public. D’accord, on ne peut pas dire que l’état d’esprit dans les tribunes ait évolué de manière positive ces dernières années (d’aucuns diront depuis le professionnalisme, mais rien n’est moins sûr). Disons que le fair-play s’est un peu dilué avec le nombre croissant de spectateurs… Mais un signe ne trompe pas : je n’ai jamais vu au stade Marcel Michelin, temple clermontois du rugby, un policier dans le stade ou autour du stade. Je n’ai jamais assisté au moindre incident. Et la présence policière autour des manifestations sportives me semble être un indicateur quantitatif fiable de la bêtise ambiante.
Le sport lui-même maintenant, et pourquoi suis-je aussi enthousiaste ? Le rugby est violent. Il l’a toujours été, il l’est de plus en plus. Pour le coup, c’est bien en raison du professionnalisme. La vitesse, le gabarit des joueurs, leur puissance physique, tout augmente au moins aussi vite que leurs salaires. La boxe, elle aussi, est violente, mais c’est un port individuel. Dans le rugby on prend des coups et on en donne, non pas pour soi, mais pour l’équipe, pour les copains, pour les supporters. Il y a dans ce sport une dose de courage, d’abnégation, de générosité qui m’épate.
Et il n’y a pas que de la violence dans le rugby ! Je renvoie à l’interview d’Aurélien Rougerie (La Montagne du 05/11/17) : « contrairement aux apparences (sic), il est aussi question d’intelligence, de stratégie, de déplacement… et c’est beau ».
Ce sport aux règles quasi incompréhensibles, qui consiste à avancer en passant le ballon en arrière, atteint parfois des sommets de poésie ! Mais si ! Lisez les Ironies ovales de Blondin, lisez l’excellent Dictionnaire amoureux du rugby de Daniel Herrero (chez Plon) et régalez-vous d’histoires de mêlées, de chisteras, de cadrage débordement, de bouchons, tampons, bouffes, cuillères et autres fourchettes, de bière et de troisième mi-temps, mais aussi de respect des règles, des arbitres et des adversaires, comme nulle part ailleurs…
Voilà pourquoi j’aime le rugby, et aussi parce que, comme le dit Herrero, on s’y rencontre plus qu’on ne s’y croise.
MT